INTIMITÉ|Journal du Jura 13.02.2021 PAR MAEVA PLEINES
Pas toujours facile de concilier mesures de sécurité et santé sexuelle.
Deux sexologues biennoises partagent leurs perspectives sur l'impact de la pandémie.
"L'anxiété est la pire ennemie du désir, et la période que nous traversons est particulièrement anxiogène", lance Gislène Zürcher, sexologue indépendante à Bienne. Celle-ci assure que les célibataires sont plus touchés par les conséquences de la pandémie. «Ils se retrouvent d’autant plus seuls, sans lieux de rencontre», observe-t-elle. «Par conséquent, la plupart passent par des sites de rencontre et se retrouvent en extérieur, pour des balades, car un échange écrit ne peut pas remplacer un face-à-face pour estimer si le langage corporel ou la voix de l’interlocuteur nous plaît», analyse la thérapeute, soulignant qu’en ce moment la majorité de ses clients n’ont pas de relation romantique.
“Il faut du temps dédié à soi pour avoir envie de retrouver l’autre.”
GISLÈNE ZÜRCHER, SEXOLOGUE À BIENNE
«Quant aux couples, le premier confinement a permis de ralentir le rythme et prendre du temps pour l’autre. Chez certains, l’impact a donc été positif. D’ailleurs, le récent boom des naissances en atteste. La situation a toutefois évolué lors de la deuxième vague, car on ne voit plus le bout du tunnel», complète Mireille Baumgartner, sexologue à Bienne. La population commence ainsi à chercher davantage d’aide car le bouleversement sociétal s’inscrit dans la durée. «La perte de vie sociale et d’activités en extérieur force les couples à réinventer leur cohabitation. Ils doivent réussir à aménager du temps pour se retrouver, d’abord chacun de son côté, puis ensemble», commente Gislène Zürcher. Elle souligne en effet le besoin d’intimité propre à chacun: «H faut commencer par se dédier du temps à soi-même afin d’avoir envie de retrouver l’autre.»
Tensions exacerbées
Pas facile de déconnecter lorsque l’on vit en vase clos, entre isolation sociale, activités restreintes et télétravail. «Certaines tensions peuvent naître lorsque la frontière se brouille entre vie privée et vie professionnelle. C’est encore pire pour les couples vivant avec des enfants dans un espace restreint», observe Gislène Zürcher. «Nous sommes confrontés à l’autre, à la place des mille et un divertissements dont nous avons l’habitude. Et on ne peut pas demander à notre partenaire de remplacer tout ça», surenchérit Mireille Baumgartner. Certains non-dits peuvent voir le jour entre les partenaires, car on ne souhaite pas affliger l’autre avec ses émotions alors que la période est déjà difficile», explique Gislène Zürcher. Dans ce genre de situation, la médiation d’une personne neutre peut aider à amorcer la discussion. «Evidemment, l’harmonie dépend de la dynamique préexistante, car la crise a tendance à exacerber les tensions», s’accordent les deux sexologues.
Dans ces conditions, comment rallumer la flamme dans une relation en perte de vitesse? Pour commencer, Gislène Zürcher propose de hiérarchiser les points à travailler. «Car parfois, les problèmes sexuels ne révèlent qu’un symptôme à d’autres causes, comme la dépression.»
D’autres fois, il suffit de porter un regard nouveau sur l’autre, de redonner de la place à la séduction et de casser la routine. «Un repas spécial ou un bain ensemble représentent autant de petites attentions qui peuvent avoir un grand impact», souligne Gislène Zürcher. Elle préconise également de bien séparer
le temps de travail des moments privilégiés à deux .
A l’approche de la Saint-Valentin, Mireille Baumgartner propose par exemple de profiter de la fête pour anticiper de jolies surprises. «Les rêves et les fantasmes font naître le désir. C’est donc l’occasion de se montrer audacieux et inventif», sourit-elle.